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Les sans-papiers grévistes de la faim évacués

Publie le mardi 3 mai 2005 par Open-Publishing

Les onze hommes qui en étaient à leur quarante-septième jour de jeune ont été amenés dans des hôpitaux parisiens
 « Evacuation sanitaire », justifie la préfecture
 Ce dont conviennent leurs partisans qui dénoncent cependant le refus du gouvernement de dialoguer

Par Ludovic Blecher

A l’aube, Souare, 32 ans, était encore aux côtés des sans-papiers en grève de la faim depuis 47 jours dans une salle de la Bourse du Travail, rue de Turbigo, à Paris. 11 hommes - en majorité Algériens, Marocains et Maliens - tenaient encore, bien décidés à poursuivre le mouvement malgré le corps qui lâche peu à peu. A 7h00, Souare, membre du comité de soutien les a quittés pour « prendre une douche à l’extérieur ». « Quand je suis revenu vers 8h00 », tout était bloqué, raconte-t-il debout derrière les barrières qui le séparent des CRS. Vers 08h30, mardi matin, l’évacuation des grévistes de la faim a débuté. « Une évacuation sanitaire pour ces personnes qui nécessitent des soins médicaux », explique la préfecture. Une heure plus tard, tous avaient été conduits vers des hôpitaux.

C’est à l’abri des regards que l’opération s’est déroulée. Sans excès de violence malgré les bousculades, assurent des témoins. Imed Berriche, délégué du 9e collectif des sans-papiers était à l’intérieur : « Des agents des renseignement généraux sont arrivés avec les pompiers et des policiers en civil. Ils ont d’abord tenté de discuter avec les grévistes qui ont refusé de sortir. Alors il les ont embarqués de force. Finalement ce sont les délégués qui les ont convaincus de se laisser emmener ». Un jeune enrage : « Ils se sont parfois mis à quatre pour les sortir. Ce n’est pas avec la force que Villepin va régler le problème. » Catherine Jégout, élue communiste au conseil de Paris, qui se trouvait aussi sur place confirme que « les grévistes refusaient de se faire évacuer » avant d’être « évacués un par un par les pompiers ». Tout en fustigeant le gouvernement qui a refusé d’engager des négociations, elle reconnaît que les grévistes risquaient des « lésions irréversibles ».

Dans la salle où ils étaient rassemblés, ne restent que les traces de leur présence : des matelas roulés, d’autres posés à même le sol sur lesquels les grévistes étaient encore allongés quelques minutes plus tôt, des casseroles et quelques chaises empilées. Les sans-papiers non grévistes et membres des comités de soutien sont là. Regards amers. Certains interpellent Noël Mamère, alertés par ses « amis verts ». « Comment voulez-vous qu’on s’intéresse à la politique quand des gens qui travaillent ici ou dont leur parents ont combattu pour la France se font virer comme ça ? » « On a le sentiment d’être impuissant, réplique le député. Les sans-papiers ne sont plus à la mode chez les homes politiques. C’est la spirale de l’oubli. La France est devenu un pays du repli, de la peur. Même l’Italie de Berlusconi a massivement régularisé alors que nous on entretient l’immigration sélective où un bon immigré c’est l’immigré qui viendrait d’Inde avec des diplômes d’informaticien, et l’immigré qu’il faut rejeter, c’est celui qui vient de nos anciennes colonies. »

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